Antología poética de Jean Claude Renard

Traducción de Sagrario Rollán

 

Antología

 

 

TROISIÈME CHANT DE  L´AVENTURE
Nous appartiendrons à la nuit,
nous entrerons dans la misère 
des étrangers et de la terre 
avant de revoir le pays, 
le pays aux noces troublantes 
qui nous sauvera de l'enfer, 
qui sera blanc comme la mer 
et doux et frais comme des plantes, 
le pays où sont les pardons, 
le pays où sont les enfances, 
ailleurs, ailleurs, dans le silence, 
dans la paix des jeunes saisons, 
quand nous aurons quitté les landes 
où sanglotent ceux qui sont morts, 
où sont ensevelis les corps 
qui ne croyaient plus aux légendes, 
aux espaces humains et mûrs 
dont nous tenterons l'aventure 
au travers des villes obscures, 
au-devant d'un pays plus pur...

de Cantiques pour des pays perdus, 1947

TERCER CANTO DE LA AVENTURA
Perteneceremos a la noche,
entraremos en la miseria
de los extranjeros y de la tierra
antes de ver el país,
el país de turbadoras nupcias
que nos salvará del infierno
que será blanco como el mar
como plantas, suave y fresco,
el país donde el perdón se encuentra
y se hallan las infancias,
en otra parte, en otra parte, en el silencio
en la paz de las estaciones tempranas
cuando hayamos abandonado los eriales,
donde sollozan los que están muertos
donde están sepultados los cuerpos
que no creían en las leyendas
en los espacios humanos y maduros
cuya aventura intentaremos
a través de oscuras ciudades
anticipando un país mas puro...

de Cánticos por los países perdidos, 1947

 

 

GENÈSES
Ô mon Chanteur enseveli 
dans le plus retiré de l'âme, 
n'enlève pas de moi cette arme 
qui m'a tué, qui m'a guéri! 
Il m'a tant été révélé 
par celle qui n'a plus mes jours, 
tant de toi, tant de ton amour 
que je ne sais plus qui j'étais.

Voici vraiment que ta parole 
nous a conçus pour l'aventure, 
nous serons de ceux qui consolent, 
nous apprendrons la langue pure 
d'où naîtra la nouvelle enfance, 
- les raisins, les coqs, les genêts 
dont nos corps amers sont extraits 
se recréeront dans l'innocence.

Suis-je en toi-même plus qu'en moi 
l'être central que je cherchais, 
n'est-ce pas lui, serait-ce toi 
en qui je me sens tout changé? 
L'éclat des pays rituels 
qui foudroya les  Argonautes 
me défait en toi de ma faute, 
t'accomplit en moi dans tes Ciels.

Ce dont je vis, ce dont je meurs 
et me perpétue en ailleurs 
n'est rien d'ici, mon Bien-Aimé, 
hors l'amour qu'il me faut former 
pour que tout se charge d'oiseaux 
et que seul avec ta beauté 
je sois un sommeil aimanté 
de mille soleils musicaux...

de Haute-mer, 1950

GÉNESIS (Fragmento)
¡Oh mi Cantor sepultado
en lo más recóndito del alma,
no arranques de mí este arma 
que me ha matado, que me ha curado!
Me fue revelado tanto
por aquella otra distinta de mis días
tanto de ti y de tu amor
que ya no sé quién era yo.

He aquí que en verdad tu palabra
nos concibió para la aventura, 
seremos de aquellos que saben consolar, 
aprenderemos la lengua pura
de donde  nacerá la  nueva infancia
- nuestros cuerpos amargos como extractos 
de uvas, gallos y  retamas
se recrearán  en la inocencia.

¿Soy en ti mismo más que en mí
el ser central que yo buscaba,
no es otro que tú
en quien yo me siento transformado?
El estallido de las tierras rituales
que fulminó a los Argonautas
me deshace en ti de mi falta
te colma de mí en tus Cielos,

Por nada de aquí, Amado
me desvivo ni muero
Sino que me perpetúa más allá
el amor que he de cultivar
para que todo se cargue de pájaros
y que  a solas con tu belleza
yo sea un sueño imantado
de mil soles musicales...

de Alta mar, 1950

 

 

NAISSANCE DE LA MER
Mon âme est prise dans la chair 
d'un amour de mauvaises lunes.
est mourante, est morte, est nocturne 
comme des amants dans la mer.

Mais maintenant la mer est noire, 
ses aromates, ses sommeils 
ont mûri les amants vermeils 
dont je tourmentais la mémoire.

Entamez-moi qui me lamente, 
mes bien-aimées, mes mille émois, 
emmenez-moi,  emmêlez-moi 
parmi les musicales menthes.

Ô la mer amoureuse et ronde 
maintenant en métamorphoses 
brûle en moi ses bêtes profondes, 
ses courants d'oiseaux et de roses...

de Haute-mer, 1950

NACIMIENTO DEL MAR
Mi alma está prendida en la carne
de  un amor maldito en lunas,
está agonizante, está muerta, es nocturna
como amantes en el mar.

Mas ahora el mar es negro,
sus aromas y sus sueños
maduraron a los amantes encarnados
cuya memoria era mi tormento.

Holladme, yo que me quejo,
mis emociones, amadas mías,
conducidme, mezcladme
entre las mentas musicales.

Oh, el mar amoroso  y redondo
ahora en metamorfosis
abrasa en mí sus bestias profundas,
sus corrientes de pájaros y rosas...

de Alta mar, 1950

 

 

Metamorfosis del mundo

 

EXERCICE DE L´INCARNATION
Celui qui est toute une enfance, 
un enfant de haute beauté, 
celui d'herbes, celui d'oiseaux 
qu'on voit quand on rejoint la mer 
m'a retenu en passion.
m'a retenu pour quelles amours 
en patience sur la terre?

Celui qui est comme des feuilles 
pour quelle nuit que je ne sais, 
pour quel pays, pour quelle mort 
celui d'ici, celui d'ailleurs 
qui est le corps secret du monde 
a-t-il retenu ma mémoire, 
l’a-t-il retenue dans la chair?

Celui pour qui je suis en mal, 
je suis en chant, je suis en femme 
m'a-t-il retenu dans les arbres, 
m'a-t-il retenu dans mes os 
celui de l'air, celui du feu, 
m'a-t-il retenu en mystère 
pour y être plus que je suis?

de La métamorphose du monde, 1951

EJERCICIO DE LA ENCARNACION (Fragmento)
Aquel que es toda una infancia,
un hijo de alta belleza,
el de las hierbas, el de los pájaros
que se ven cuando se alcanza el mar
me ha retenido apasionadamente,
¿para qué amores me ha retenido
paciente sobre la tierra?

Aquel que es como hojas,
¿para qué noche que no conozco,
para qué país, para qué muerte
ha retenido mi memoria,
la ha retenido en la carne?
El de aquí, el de otra parte,
que es el cuerpo secreto del mundo.

Aquel  por quien estoy penando
por quien soy canto y soy mujer, 
¿me ha retenido en los árboles,
me ha retenido en mis huesos,
el del aire, el del fuego,
me ha retenido misteriosamente 
para ser (en mí) más que yo mismo?

de La metamorfosis del mundo, 1951

 

INCANTATION DU CORPS
Ma bouche soit délivrée!
Je goûterais l'arbre blanc.
Je mangerais le muscat
qui est planté dans la ville.

Me soit ouverte l'oreille!
Je reviendrais du désert.
J'aurais mon pacte et mes noces
avec la fable du lait.

Les mains me soient incisées!
Je sentirais le vrai sel.
Je toucherais sous le pain
la pierre rouge et royale.

L'été féconde mes yeux!
Je prendrais sang dans le fleuve.
J'entrerais mûr au foulage.
Je danserais vers le vin.

de En une seule vigne, 1959

ENCANTAMIENTO DEL CUERPO
¡Que mi boca sea liberada!
Degustaré el árbol blanco.
Comeré el moscatel 
que está plantado en la ciudad.

¡Que se me abra el oído!
Volveré del desierto.
Tendré mi pacto y mis bodas
con la leyenda de la leche.

¡Que me injerten las manos!
Sentiré la verdadera sal
Bajo el pan tocaré 
la piedra regia y roja

¡Que el verano fecunde mis ojos!
Tomaré sangre en el río
Entraré maduro en la pisa
Y danzaré hacia el vino.

de En una sola viña, 1959

 

L ?OSSATURE DE L ?OR.

Ô respiration commencée
au centre du pain et de la neige !

Comme des lions qui hument l'homme,
c'est noces dans le sacre solaire.

L'huile essentielle magnifie
l'ossature de l'or sur les fleuves.

La grande oreille mère, — le sang
s'échangent dans l'eau œcuménique.

Et l'œuf rose de la mer mûrit
entre la transparence du feu.

La langue même de Dieu traverse
toute la plénitude des vignes.
de En une seule vigne, 1959
LA OSATURA DEL ORO
¡Oh respiración comenzada 
en el centro del pan y de la nieve!

Como leones barruntando al hombre, 
se celebran bodas en la consagración solar.

El aceite esencial magnifica
la osatura del oro sobre los ríos.

La gran oreja madre, -la sangre
se abrazan en el agua ecuménica.

El huevo rosa del mar madura
entre la transparencia del fuego.

La lengua de Dios mismo atraviesa
toda la plenitud de las viñas.
de En una sola viña, 1959

 

En una sola viña

L´ODEUR DE DIEU
L’odeur de Dieu circule sous les arbres.
L’odeur musclée de l’ esprit, - et luisante.
Pour moi, j’avance doucemente vers l’eau.
Elle me guette comme un léopard.
Un grand léopard blanc brûlant la mer.
Je lui allierai la force de l’homme.
Je ferai ses noces de mon désir.
Mon coprs est prêt pour le miel et les grappes.
J’entends l’amour étrange entre la terre.
Et mon sang qui croît vers mon autre sang.
Je tendrai ma  bouche comme une nappe.
Un pain couvert de tours et de navires.
Les femmes d’or danseront dans les pluies.
Ce sera groseilles. Je veillerai.
Je veillerai jusqu’aux métamorphoses.
Et avec moi les villes foudroyées.
Seuls les soleils mûrs naîtront dans mes os.
de En une seule vigne, 1959
EL OLOR DE DIOS
Bajo los árboles circula el olor de Dios.
El olor vigoroso del espíritu, -y reluciente.
Mientras yo avanzo suavemente hacia el agua
me hostiga como un leopardo.
Un gran leopardo blanco abrasando el mar.
Yo le aliaré la fuerza del hombre, 
haré sus nupcias de mi deseo.
Mi cuerpo está dispuesto para la miel y los racimos.
Entre la tierra oigo el extraño amor,
y mi sangre creciendo hacia otra sangre mía.
Extenderé mi boca como un mantel.
Un pan cubierto de torres y navíos.
Mujeres doradas bailarán en las lluvias.
Habrá grosellas. Yo velaré.
Velaré hasta las metamorfosis.
Y conmigo las ciudades fulminadas.
Sólo soles maduros nacerán en mis huesos.
de En una sola viña, 1959

 

POUR LA LUMIÈRE ET POUR LE VIN
Ô voyages magnétisés!
Dans la mémoire sous la laine,
dans le mystère entre les morts
n'est pas détruite la racine
qui charge d'herbe et d'or la chair,
mais séparée — et la narine
dure à la force de ton sel,
ô mon soleil ! Cette semence
plantée plus vive que la vie
aux origines du silence
cherche pourtant, dedans le corps
frappé déjà d'éternité,
à le changer en elle-même.
Et comme d'un seul poumon mues
les hautes respirations,
c'est de toutes glaises obscures
une traversée, une enfance
vers l'eau centrale de l'été.
de Incantation des eaux, 1961
POR LA LUZ Y POR EL VINO
¡Oh viajes magnetizados!
En la memoria bajo la lana,
en el misterio entre los muertos
no está destruida  sino separada
la raíz que carga 
de hierba y de oro la carne,
- y la nariz se resiste a la fuerza de tu sal,
¡oh sol mío! esta semilla
plantada más viva que la vida
en los orígenes del silencio
busca sin embargo, dentro del cuerpo
sacudido ya de eternidad
transformarlo en ella misma.
Y como movidas por un solo pulmón
las altas respiraciones,
son una travesía de todas  las arcillas oscuras,
una infancia
hacia el agua central del verano.
de Encantamiento de las aguas, 1961

 

 

El dios de noche

 

 

PAROLE 5
J´approche des prés blancs
Qui brûlent sous la mer.
Tout commence en ce lieu où l'un se change en l'autre.
Tout est en lui vécu.
Toute mort est ouverte à l'être essentiel présent dans toute mort.
L'être est pour elle en elle.
Elle est en lui pour lui.
Il n'y a pas autre part d'espace ni de temps.
Avant que d'être plus que ce qui se vivra.
Peut-être, dans l'absence de la gloire sans nom,
L'éternité est là.
L'éternité n'est là que pour être accomplie
Dans le secret natal de la similitude et de la différence.
Le silence est plus qu'une trace.
de Le Dieu de nuit, 1973
PALABRA 5
Me acerco a prados blancos
que arden bajo el mar.
Todo comienza en este lugar donde uno se cambia en otro.
En él todo está vivido.
Toda muerte está abierta al ser esencial presente en toda muerte.
El ser es para ella en ella
Ella es en él y para él.
No hay otro lugar ni de espacio ni de tiempo.
Antes de trascenderse en lo que se vivirá,
Quizá en la ausencia de la gloria sin nombre,
Se encuentra la eternidad.
La eternidad está ahí para ser cumplida.
En el secreto natal de la semejanza y de la diferencia.
El silencio es más que una huella.
de El dios de noche, 1973

 

 

Dedicatoria

FUENTE: Sagrario Rollán